Luther théologien de l’image

Les lignes qui suivent voudraient combler un manque et rectifier une méprise. On a abondamment parlé du réformateur de Wittenberg à l’occasion de l’« année Luther » de 1983. ETR s’est fait l’écho de quelques-uns des nombreux travaux publiés à l’occasion de ce jubilé. Il n’a pourtant point été fait mention du rapport de Luther aux images, rapport beaucoup plus riche et complexe que ce que l’on croit en savoir. Aucun mention, non plus, des trois grandes expositions jubilaires – à Nuremberg, à Hambourg, à Berlin (Est) – qui furent des événements culturels de première importance dans les deux Allemagnes d’alors, et montrèrent – au sens propre – l’importance qu’a eue l’image dans la diffusion des idées de la Réforme. Au vu et à l’étude de ces documents iconographiques contemporains de Luther, on peut même poser le constat suivant : Les idées de la Réforme ne se seraient pas aussi facilement propagées, sans des supports visuels d’une valeur esthétique certes modeste ce qui explique qu’on les a longtemps ignorés) mais qui ont cependant eu un impact considérable. A cela s’ajoute une méprise de J.-D. Kraege qui, parlant de Luther « théologien de la musique », croit pouvoir opposer le seul art véritable qu’est, selon lui, la musique, aux arts plastiques dont il parle en des termes peu flatteurs. (Jean-Denis Kraege, « Luther théologien de la musique », ETR, 58, 1983/4 p. 449-452). Or, si Luther a été un théologien de la musique, il a été également un théologien de l’image. Partant des paroles et des œuvres de Dieu, il estime nécessaire de « les chanter, les dire et les mettre en musique » mais aussi de « les prêcher, les écrire, les lire, les peindre, les dessiner ».

p. 561-567

Auteur

COTTIN Jérôme
Jérôme COTTIN est professeur de théologie pratique à la Faculté de théologie protestante de l’Université de Strasbourg, chargé d’enseignement à l’Institut supérieur de théologie des arts du Theologicum de l’Institut catholique de Paris.